Shiri : le premier blockbuster coréen

Après « Seven Day » et « Harmony » que nous vous avons présentés les semaines précédentes, continuons notre rétrospective des films qui ont fait la réputation de la célèbre actrice Kim Yun-jin ; nous allons vous parler aujourd'hui d'un film majeur qui a révolutionné l'industrie du cinéma coréen : il s'agit bien sûr de « Shiri ».
Ce long-métrage est réalisé en 1998, par le réalisateur Kang Je-gyu. Fort du succès deux ans plus tôt de son film « The Gingko Bed », Kang obtient un financement à l'époque hors du commun pour un film coréen : environ 4 millions de dollars. Ils seront bien dépensés ; lors de sa sortie en février 1999, le film fait un carton immédiat et sans précédent au box-office sud-coréen : 6,2 millions d'entrées, battant tous les records de l'époque, y compris le nombre d'entrées de « Titanic ».
Ce succès a surpris les producteurs eux-mêmes, et est d'autant plus remarquable qu'il y a dix ans, le nombre de salles en Corée était beaucoup moins élevé que maintenant. « Shiri » est ainsi considéré comme le premier blockbuster coréen, un film clairement inspiré par les techniques de réalisation et de narration en vigueur à Hollywood. En parvenant à adapter ce style au pays du Matin clair, Kang Je-gyu en bouleverse à jamais le paysage cinématographique. Après « Shiri », beaucoup d'autres films hollywoodiens suivront, avec un bonheur inégal. Kang, quant à lui, renouera avec le succès cinq ans plus tard, avec « Taegugki », un autre film ayant pour thème la séparation de la péninsule.
« Shiri » appartient à deux genres à la fois : le film d'action, avec son lot de course poursuites, de fusillades, de bagarres, de bombes qui font tic tac et d'immeubles qui explosent dans des fracas d'effets pyrotechniques. Mais c'est aussi, d'une certaine façon, un mélo, qui finira très mal. Le film nous raconte l'histoire d'un complot ourdi par des militaires nord-coréens dans le but de réunir la péninsule sous la bannière communiste, en commençant par faire exploser toute la ville de Séoul.
Un commando aguerri s'infiltre dans la capitale : ce sont d'impitoyables et sanguinaires espions, dont le chef est interprété par le très convaincant Choi Min-sik. Face à eux, deux agents secrets sud-coréens, les meilleurs bien sûr, feront tout pour les en empêcher. Ils sont joués par les grands acteurs Han Suk-kyu et Song Kang-ho. La fiancée de l'un d'entre eux, jouée par une Kim Yun-jin dix ans plus jeune mais aussi talentueuse, semble cacher un lourd secret...
Revu dix ans plus tard, « Shiri » est, bien sûr, délicieusement démodé. Costumes, maquillage, mais aussi façon de filmer et dialogues : le film est marqué par son époque. On retrouve avec un véritable plaisir des acteurs majeurs tout jeunots, et ce film permet de mesurer l'évolution spectaculaire du cinéma coréen en à peine dix ans. Autre point intéressant, si le film met en scène des nord-Coréens patibulaires et violents, perpétuant ainsi une longue lignée de films anti-communistes, on peut remarquer que le portrait s'est remarquablement nuancé : ces agents nord-coréens sont sincères dans leur désir de réunification, le spectateur peut même – parfois - sympathiser avec certains de leurs commentaires et points de vue. Cette révolution dans la représentation des nord-Coréens à l'écran sera complète un an plus tard, avec le magistral « JSA », de Park Chan-wook.
Notre premier blockbuster coréen ne vous épargnera pas quelques dialogues prévisibles, un romantisme un peu mièvre, des incohérences de scénario, des fadaises scientifiques et quelques clichés à la douzaine. Mais ces défauts font presque partie du charme du film... La mise en scène rythmée, un peu vieillotte certes, reste très efficace. C'est donc avec plaisir qu'on peut revoir ce film historique du cinéma coréen, qui a permis à ce dernier de prendre conscience de son potentiel commercial : après « Shiri », rien ne sera plus comme avant.






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