Mi-in-do

L’histoire de « Mi-in-do » est tirée d’un roman de Lee Jeong-myeong, et s’inspire très librement de la vie du peintre Shin Yun-bok; le film s’amuse à imaginer que ce célèbre artiste coréen... était en réalité une femme, obligée de se déguiser en homme. Une idée intéressante d’un point de vue du scénario, et qui rappelle la forte oppression dont souffraient les femmes à l’époque de la dynastie Joseon : il était impossible pour une jeune fille, même très talentueuse, de devenir peintre. Sauf pour notre héroïne, dont le rôle est interprété par la talentueuse actrice Kim Min-seon, et dont le père décide de dissimuler les formes féminines et qui l’envoie, déguisée en homme, étudier la peinture classique auprès d’un grand maître. Celui-ci est interprété par Kim Yeong-ho.
Notre mystificatrice se révèle une artiste géniale, à l’œil acéré et à la main sûre, capable d’émouvoir par quelques traits et coups de pinceau. Le film raconte ses années d’apprentissage, sa rencontre avec un jeune homme déluré et débrouillard, qui ne va pas tarder à découvrir la vérité, et à tomber amoureux de la jeune fille en fleur qui se cache derrière l’apprenti-peintre. Celle-ci se laisse entraîner par son amoureux qui veut lui faire découvrir la vraie vie du petit peuple coréen, gouailleur, bagarreur, chaleureux, grivois et fêtard ; elle assiste à beaucoup de scènes populaires et quotidiennes, qui seront la source d’inspiration de ses plus célèbres tableaux. Les premiers jours de leur histoire sont idylliques, nos amoureux se chamaillent dans des champs de fleurs, ils courent en forêt, leur bonheur est sans nuage... pas pour longtemps hélas.
Comme dans tout drame coréen qui se respecte, une tragédie s’ensuit : le maître tombe amoureux de son disciple, le jeune Roméo est condamné à mort, la souffrance et la mort seront le prix à payer pour ces instants d’insouciance. Les scénaristes n’ont pas hésité à tirer sur quelques grosses ficelles pour noircir un tableau qui n’en avait pourtant pas besoin. Le film bénéficie d’une idée originale, d’une photo réussie, et du talent de ses acteurs. Hélas, après une première demi-heure plutôt réussie, qui s’intéresse au processus de création artistique et à l’interaction entre ce que voit l’artiste et de qu’il exprime sur le papier, le film perd rapidement de son intérêt. Il cesse de se concentrer sur l’artiste pour privilégier la romance, laquelle est peu convaincante. L’intrigue devient trop invraisemblable pour passionner le spectateur, qui s’aperçoit vite que les personnages manquent de profondeur psychologique.
Ce film a aussi fait beaucoup parler de lui en raison de quelques scènes très érotiques qu’il contient. Le réalisateur hésite entre un penchant très osé, comme par exemple cette idée originale de tourner une scène de peep-show lesbien à l’époque Joseon... et un penchant très kitsch, comme cette scène du premier amour, à l’ambiance un peu, comment dire... cul cul la praline. Il faut ici saluer le courage des acteurs de s’être dévoilé ainsi, mais malheureusement ces scènes n’apportent rien au film... si ce n’est un buzz médiatique toujours utile pour augmenter les ventes de billets !
Tout cela ne suffit pas à cacher le manque de richesse du film, et le manque de crédibilité de son histoire. Le film souffre d’autant plus de la comparaison avec le drama qui raconte la même histoire et qui est beaucoup plus réussi. Alors, « Mi-in-do », fausse bonne idée, ou vrai bon film? Rien ne vous empêche d’aller décider vous-même, au moins vous serez assurés de voir de belles images... tout en sachant que ceux qui ont aimé le film « Ivres de femmes et de peinture » repartiront déçus : en matière de films qui relatent la vie d’un peintre, le chefs-d’oeuvre de Im Gwon-taek reste, et de loin, inégalé.





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