La Beauté Sans Visage

Le mois de juillet a commencé et si le soleil brille à l’extérieur, dans les salles de cinéma, c’est le noir des thrillers qui prime. Aussi, pour inaugurer cette saison de films d’horreur en douceur, parlons d’un film qui fait plutôt partie de la catégorie psycho-mélodramatique mais dont le twist final donne tout autant froid dans le dos.
Il s’agit de Eolgul Eobneun Minyeo réalisé en 2004 par Kim In-sik avec l’actrice Kim Hye-su dans le rôle principal. Traduit en anglais par Faceless Beauty ou encore Hypnotized, le titre signifie « La Belle Femme Sans Visage », ce qui est un peu un non-sens puisqu’à partir du moment où elle n’a pas de visage, on peut difficilement la qualifier de belle. Mais là encore, tout va prendre son sens à la fin de notre histoire.
* Chaos organisé
Le film débute dans une atmosphère assez sombre où l’on voit Ji-su, une belle femme aux lèvres pulpeuses et à la chevelure sauvage, en train de taper frénétiquement sur son ordinateur. C’est un roman qu’elle écrit ainsi avec passion. Ou bien ces scènes que s’esquissent sous nos yeux seraient-elles inspirées d’expériences personnelles ? L’éclat bleuté émanant de l’écran éclaire son visage d’une lumière spectrale. L’obscurité où elle se trouve contraste étrangement avec la luminosité de son imagination dans laquelle se dessinent des silhouettes colorées. Et puis soudain les objets qui l’entourent se mettent à flotter. L’atmosphère est irréelle. Le temps semble être suspendu, jusqu’à ce que… tout tombe brusquement.
Sans transition, on apprend que cette jeune femme est mariée et que son mari la trompe. On la retrouve internée dans un hôpital psychiatrique, le regard un peu vague, comme s’il se perdait dans une autre dimension. Une femme tout de blanc vêtue et que personne d’autre ne semble remarquer vient hanter son quotidien, ses promenades. Les scènes qui se suivent sans se ressembler nous paraissent incohérentes, les évènements, chaotiques. En réalité, ils sont truffés d’indices, de fils conducteurs visuellement discrets, telle cette couleur rouge que Ji-su semble toujours porter sur elle.
* Entre rêve et réalité
Un an plus tard, on la retrouve dans un supermarché en train de faire des courses, plus exubérante que jamais. Piquant une crise suite au refus de sa carte bancaire qui semble avoir atteint sa limite, elle est secourue par un homme à lunettes, un docteur qu’elle avait déjà croisé lors de son internement. Pourtant, ni l’un ni l’autre ne paraissent s’en souvenir. Débute alors une relation – au départ strictement professionnelle – qui va causer leur perte.
Durant leurs sessions, Ji-su s’égare dans ses fantasmes qu’elle prend pour ses propres souvenirs pendant que Seok-won, le docteur incarné par l’acteur Kim Tae-woo, profite de ses hallucinations pour abuser de cette femme qui s’offre inconsciemment à lui. Bientôt, c’est lui qui se perd dans sa folle passion qui l’intoxique au point qu’il ne peut s’en passer. Pour s’assurer de sa présence à ses côtés dès qu’il est « en manque », il hypnotise la belle Ji-su qui, à chaque fois qu’il l’appelle, cesse toute activité pour le rejoindre, telle une marionnette dont il tire les ficelles de loin. Jusqu’au jour où… elle ne vient pas.
Porté par une Kim Hye-su sensuelle, forte et fragile à la fois, ce film est un puzzle visuel dont les pièces éparpillées finissent pas toutes s’emboîter dans un final horrifique. Le réalisateur, qui a fait des études en France, semble avoir gardé de son séjour dans la métropole un goût certain pour la complexité et prend plaisir à nous égarer dans une tortueuse affaire qui prend fin de façon inattendue. Primé au Festival International du Film de Milan pour sa cinématographie, le film s’est également vu octroyer deux autres récompenses pour la prestation, sublime, de son actrice principale.





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