jeudi 29 juillet 2010

cinema coreen :Dachimawalee

Voici un ovni dans le paysage cinématographique coréen, le dernier film de Ryu Seung-wan, « Dachimawalee », sorti en août 2008. On y trouve son frère, Ryu Seung-beom, l’acteur Lim Won-hee ainsi que quelques actrices célèbres, dont la fameuse Park Si-yeon, connue pour s’épanouir dans des films originaux quand ils ne sont pas franchement étranges...

Le film est une audacieuse parodie, pleine de fraîcheur sur la scène coréenne. On connaissait déjà « Arahan » par exemple, du même réalisateur, qui s’attaquait aux mythes des héros d’arts martiaux, et bien celui-ci est un mélange de genre de parodies. Tout d’abord, l’histoire se déroule dans de nombreux endroits, mais tout a été tourné en Corée, avec humour… Et elle traite des résistants face à l’envahisseur japonais, personnifiés par un héros qui rappelle beaucoup James Bond ou Austin Powers, par son style, mais aussi par le style du film ! Un style très années ’70 dans sa facture, en commençant par les crédits d’ouverture, composés de cadres qui s’entrecoupent avec des personnages en ombres chinoises, et en continuant par les musiques, dont on citera la célèbre « Geuttae geu saram » de Sim Su-bong.

Le plus marquant de ce film est l’humour, rare et difficile à faire passer, tant dans un film que par-dessus les frontières, mais pour lequel il semblerait que Ryu Seung-wan ait des qualités certaines. C’est surtout un humour décalé, comme on pourra le voir au visage de l’acteur principal, un humour même de série B pourrait-on dire, puisque le film est entièrement dans la veine de ces années-là du cinéma, avec un jeu d’acteur exagéré, des gags parfois pesants, comme notre héros qui tombe chaque fois qu’il va pour embrasser l’héroïne, et une musique inoubliable.

Aux comédies B de l’éoque, Ryu Seung-wan ajoute les possibilités techniques d’aujourd’hui, et inclus des parodies de la Corée moderne. Les larmes volent comme les balles de Matrix par exemple, et les récents films à succès y sont parodiés, citons Hwang Bo-ra, qui semble sortie directement de « Bienvenue à Dongmakgol », ou les scènes de course-poursuite dans le désert avec un side-car, qui rappellent étrangement « Le bon, la brute et le cinglé ».

Une dernière anecdote, pour illustrer cette manière de faire les films, qui existe aussi dans la nouvelle vague en France, dans le cinéma de Fellini et partout ailleurs. Trois scènes se déroulent au bord d’une rivière, de savoureux débats à propos de l’exactitude de proverbes coréens d’origine chinoise, les ‘sajaseongoh’. Eh bien, l’endroit de tournage est le même, un pont de Séoul évidemment, mais il est à chaque fois présenté comme différent, en commençant par le pont de la rivière Duman…

La sortie d’un tel film est symbolique de la crise dans laquelle se trouve le cinéma coréen, qui se cherche et n’a plus offert grand chose en 2008. Un film de cet acabit, dont certaines scènes ne sont pas sans rappeler le western japonais « Sukiyaki Western Django », et qui parodie entre autres le western coréen, est une preuve de recherche de créativité, ou d’un renouveau en tous cas. D’ailleurs, le fait que le film soit tiré d’un court-métrage diffusé sur Internet du même titre et du même auteur est révélateur du ‘grattage’ de fond de tiroir pour chercher des idées originales. Malheureusement le public coréen n’est pas encore officiellement friand de ce genre de film. Tous le voient et en rient aux larmes, surtout quand les acteurs coréens prétendent parler le chinois et le japonais, mais le film de genre n’a pas encore obtenu ses lettres de crédit auprès du spectateur coréen, qui est trop ‘sérieux’ pour aller voir ça au cinéma. Par contre, il le téléchargera sans complexes…

Ce film aurait pu être un film culte, et le sera certainement dans certains milieux, car il transcende indubitablement le film de genre, même si les moyens à dispositions ne sont pas au niveau du western coréen de Kim Ji-woon. Remarquons cependant qu’à l’international, Ryu Seung-wan commence à être connu pour son style particulier, qui a le mérite de faire rire également à l’extérieur des frontières.

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