jeudi 29 juillet 2010

cinema coreen : Mother

On doit au réalisateur coréen Bong Joon-ho quelques-uns des films les plus réussis du cinéma coréen, notamment le chef d’oeuvre « Memories of Murder », un film policier sorti en 2003, et devenu aussitôt un classique incontournable du 7ème art coréen. Après le succès public et critique de « The Host » en 2006, son nouveau film, « Mother », était attendu avec beaucoup d’impatience.

Présenté en avant-première lors du Festival de Cannes le mois dernier, « Mother » est un nouveau coup de maître de Bong Joon-ho, qui renoue avec la veine de « Memories of Murder », en se penchant sur un crime mystérieux qui a eu lieu dans une petite ville de province... et qui entraîne le spectateur dans les méandres d’une enquête atypique et pleine de rebondissements.

L’acteur Won Bin, que l’on a pu voir dans « Frères de sang», y interprète Doo-joon, l’idiot du village, un jeune simple d’esprit au regard vide, travaillé par sa sexualité et affublé d’une mémoire de poisson rouge, incapable de se rappeler ce qu’il a fait il y a plus de 5 minutes. Il subit la mauvaise influence de son ami Jin-tae, un jeune marginal du coin. Sa mère, brillament interprétée par Kim Hye-ja - qui tient là le meilleur rôle de sa carrière -, le couve de ses yeux attentifs et jaloux, et se démène pour le sortir de chacune des mauvaises passes où son imbécilité le mène.

Cependant, lorsque Doo-joon sera accusé du meurtre d’une jeune lycéenne, elle se trouvera incapable de le protéger, ni de l’empêcher d’avouer ce crime qu’il n’a pourtant pas commis. La police locale, trop contente de tenir sous la main ce coupable idéal, expédie son enquête ; Doo-joon se retrouve en prison. Commence alors pour sa mère une longue et difficile enquête dans la petite ville provinciale, enquête qui la fera passer de suspect en suspect et découvrir les aspects les plus sordides de la vie de la victime en particulier, et de ses concitoyens en général. Mais elle n’en a cure. Persuadée de l’innocence de son fils, elle ne laissera rien ni personne se mettre en travers de son chemin.

Même si il se penche avec une attention presque clinique sur la société coréenne provinciale, « Mother » est avant tout un film policier, certes atypique. L’enquête n’est pas menée par la police, mais par une mère obstinée, qui puise sa determination sans faille dans l’amour inconditionnel qu’elle porte à son fils. En menant son enquête de Pieds Nickelés version ajumma, elle passe d’indice en indice, de fausse piste en découverte dramatique. En bon film policier, l’histoire réserve aussi quelques coups de théâtre, et de moments de suspense. Le film est aussi très émouvant, notamment en raison de la performance extraordinaire de l’actrice Kim Hye-ja. Celle-ci est presque inquiétante, tant son amour pour son fils semble prêt à verser dans la folie à n’importe quel moment.

Le film bénéficie d’une réalisation sobre mais très efficace, caractéristique du réalisateur coréen. Bong Joon-ho ne s’appesantit pas sur la douleur de ses personnages, et laisse avancer l’histoire. La musique est excellente, et renforce considérablement l’atmosphère tendue qui parcout le film. Bong réalise là le portrait sans concession d’une ville de province, qui entraînera le spectateur dans les dabangs ou salons de thé bon marché, les petites échoppes crasseuses de la ville, les intérieurs pauvres des maisons populaires, et les histoires sordides de lycéens à l’avenir sans promesse. Il rappelle largement à cet égard « Memories of Murder », pour cette description d’une société dure et sans trop d’espoir. Avec « Mother », Bong Joon-ho réalise un nouveau film majeur.

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